La facilitation : un outil essentiel à la collaboration
On tourne en rond!
On a mis plusieurs milliers de dollars dans ce projet, vous avez eu des dizaines de rencontres, il faut que ça marche!
Pourquoi sommes-nous encore devant ce problème? N’avait-il pas été réglé lors de notre dernière réunion?
Ce n’est pas toujours évident de travailler en collaboration. Pourtant, si on veut innover et créer des projets durables, la collaboration est inévitable. C’est vrai pour la construction d’immeubles commerciaux, l’amélioration de l’expérience employé, la conception d’une nouvelle offre de services ou la mise en place d’une démarche globale de développement durable.
Or, même si elle semble aller de soi, la collaboration n’est pas toujours facile à mettre en place. Très souvent, malgré de bonnes volontés au départ, les équipes perdent leur motivation, vivent des tensions ou ne sont pas alignées vers les mêmes objectifs. La collaboration prend donc le bord! D’ailleurs, qui n’a jamais vécu une mauvaise expérience de travail d’équipe pendant ses études?
C’est ici que la facilitation devient plus que pertinente. La facilitation d’ateliers (ou de charrettes) est un moyen très concret et efficace de favoriser la collaboration et de faire émerger l’intelligence collective. Elle est d’ailleurs un outil essentiel à la réussite de tout atelier de design thinking!
Qu’est-ce que la facilitation?
La facilitation est un ensemble de compétences à utiliser pour travailler avec un groupe pour lui permettre d’atteindre ses objectifs d’une manière qui implique la contribution de tout le monde, renforce l’appropriation et libère le plein potentiel de tous les membres de l’équipe.[1]
Et le facilitateur•trice alors, quel est son travail?
Le mot facilitateur est en fait un anglicisme qui vient du mot anglais facilitator, pour désigner une personne qui exerce un rôle d’animation au sein d’un groupe. Selon l’Office de la langue française, « l’animateur de groupe est une personne qui voit au bon déroulement des réunions ou du travail en équipe, en veillant notamment à ce que les objectifs de travail soient bien définis, en proposant des méthodes efficaces, en coordonnant la participation de chaque membre et en favorisant la cohésion du groupe.[2] »
À la fois médiateur•trice et animateur•trice, le ou la facilitateur•trice est donc une personne qui guide une équipe ou un groupe dans un processus afin de permettre à chacun de donner le meilleur de lui ou d’elle-même. Un.e bon•ne animateur•trice de groupe doit donc s’assurer que :
- Chaque participant•e peut s’exprimer et être écouté•e;
- Des résultats concrets sont atteints lorsque l’équipe se réunit;
- Chaque participant•e peut réfléchir, formuler des idées, poser des questions, trouver des solutions en organisant les ateliers de manière efficace.
La facilitation exige donc beaucoup de préparation en amont des rencontres pour s’assurer de l’efficacité et de la productivité des ateliers de travail. C’est beaucoup plus que faire des réunions avec un ordre du jour. En gros, pour reprendre les mots de Jonathan Courtney, PDG à AJ&SMART, «my job is to help people get stuff done.»
7 qualités essentielles du ou de la facilitateur•trice (à mon avis)
Comment faciliter les réunions et ateliers de prise de décision, de stratégie ou d’innovation ?
Le ou la facilitateur•trice doit être une personne :
À l’écoute
La posture d’écoute est essentielle. Une ancienne collègue disait toujours : « tu as deux oreilles et une bouche, ce n’est pas pour rien! » Elle doit faire preuve d’écoute active et d’empathie. Elle doit également percevoir ce que les participant.e.s n’ont pas osé dire. Pour bien jouer son rôle, il faut aussi poser beaucoup de questions et sa préférée devrait toujours commencer par Pourquoi?
Curieuse
Dans ce travail, il faut rester curieux•euse, poser des questions ouvertes, voir la richesse de la diversité de points de vue. Malgré les idées reçues, le ou la facilitateur•trice n’a pas à être un•e spécialiste du sujet traité lors des ateliers. Il ou elle doit cependant cultiver le désir d’apprendre, de découvrir de nouveaux outils et conserver un esprit d’ouverture et donner l’exemple afin que les participant•e•s ouvrent également leurs horizons.
Ambitieuse
Pousser l’équipe à sortir des sentiers battus, à aller au bout de ses idées! Voilà une autre compétence importante. Elle doit aussi forcer les équipes à prendre des décisions et les pousser à tester rapidement les solutions envisagées. Elle doit avoir l’ambition de faire progresser rapidement les équipes dans les phases d’idéation, de prototypage et de test grâce à différentes stratégies : gestion du temps, couper rapidement les discussions « circulaires », définir une structure d’atelier efficace, etc.
Inspirante
Pour collaborer, les membres d’une équipe doivent d’abord être en confiance. Pour partager ses idées dans une équipe, une personne doit se sentir en confiance avec les autres membres qui composent ce groupe. C’est donc le rôle du ou de la facilitateur•trice de mettre les gens à l’aise dès les premières minutes d’un atelier. Il ou elle doit aussi mettre en pratique des techniques de collaboration afin de guider, d’aider et de soutenir les participant•e•s. Un de ses rôles est de faire ressortir les forces et les compétences de chacun•e pour faire émerger l’intelligence collective.
Rassembleuse
Elle doit créer des ponts entre les participant•e•s. Il est important d’assurer un partage du savoir et de transmettre le plus d’informations possible. Le ou la faciliteur•trice n’est pas là pour donner son avis, mais bien pour accompagner et animer les conversations, pour amener les équipes à atteindre leurs objectifs dans les délais. Show don’t tell disent les anglophones. Il ou elle doit encourager les décisions fondées sur des données, réduire les hypothèses et inviter rapidement les équipes à visualiser leurs idées pour qu’elles prennent forme rapidement et se concrétisent.
Créative
Elle connaît les techniques d’animation et elle est capable de s’adapter. Elle détient une solide boîte à outils et maîtrise une série d’exercices pour amener les équipes vers l’atteinte de leur objectif, qu’il s’agisse de prise de décisions, de résolutions de problèmes ou d’idéation. Elle guide également les équipes entre les zones de divergence et de convergence pour les amener à réfléchir à toutes les opportunités possibles.
Humble
La personne facilitatrice ne sait pas tout, au contraire! Elle connaît très souvent moins bien le sujet que son client et c’est tant mieux! Son rôle est de guider l’équipe vers la recherche de solutions et la prise de décisions. Elle doit aussi respecter les limites ou les défis de l’équipe. Elle ne peut pas vouloir plus que les membres du groupe et doit laisser les participant.e.s coconstruire leur projet.
Si le métier de facilitateur•trice se développe de plus en plus, tant à l’intérieur des organisations qu’à titre de freelancer, il reste qu’il n’est pas encore commun et nécessite souvent des explications sur son rôle exact.
La question m’est d’ailleurs souvent lancée lors des soupers de famille ou entre amis : qu’est-ce que tu fais concrètement?
En effectuant une recherche rapide sur LinkedIn, on constate que la fonction ressort de plus en plus, sous différentes formulations : maître facilitateur, animateur-facilitateur, coach Agile, etc.
Simple tendance ou un coup marketing? Pas selon le World Economic Forum [3], qui compte, entre autres, dans son top 10 des compétences pour 2025 : la résolution de problèmes complexes, la créativité et le sens de l’initiative, la pensée critique, l’esprit d’analyse et l’innovation.
La facilitation d’ateliers fait appel à toutes ces compétences, et ce, tant auprès des participant•es que de l’animateur•trice. Elle est aussi un outil puissant, pour favoriser la collaboration et inviter toutes les parties prenantes à participer à la recherche de solutions.
Vous avez envie de découvrir concrètement le travail d’un•e facilitateur•trice?
Découvrez les portraits de facilitateur•trices dans différents secteurs!
Lotfi El-Ghandouri, fondateur et PDG de yiqqi.
Jean-François Banville, directeur coopération et leadership socioéconomique chez Desjardins.
Marie-Ève Milot, architecte et coach certifiée, directrice expérience collaborative à L’Atelier urbain.
Julia Gaudreault-Perron, conseillère à l’innovation à l’Université Laval.
Arnaud Rogiez, conseiller-expert et facilitateur d’atelier PCI chez Stratégia Conseil.
François Cantin, associé | Directeur avant-garde, chez Coarchitecture.
Cet article est la suite d’une série d’articles rédigés en collaboration avec Patrick Vallerand, conseiller-expert en projets d’infrastructure et président de Stratégia Conseil.
Sources ayant servies à l'élaboration de cet article :
[1] Traduction libre de Marie-Andrée Roy. ICA: UK (2022). Consultation en ligne : https://bit.ly/3p89603
[2] OFFICE QUÉBÉCOIS DE LA LANGUE FRANÇAISE. (2022). Consultation en ligne: http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8352330
[3] World Economic Forum (2020). Consultation en ligne: https://www.weforum.org/agenda/2020/10/top-10-work-skills-of-tomorrow-how-long-it-takes-to-learn-them/